Niort, un samedi
Niort c'est d'abord une cité très ancienne avec un noyau dur figuré par deux époques grandioses dont les deux monuments emblématiques constituent le coeur. Au temps de sa grandeur elle fut intimement mêlée au destin national et c'est le donjon qui est l'empreinte de cette histoire. Je ne vous la raconterai pas, il existe d'excellent bouquins là dessus ; bien supérieurs à ce que j'ai pu trouver sur le net. L'originalité du donjon est son caractère à deux tours : une rareté en Europe. En avant plan les Halles inspirées par Baltard au XIX° siècle. Il est assez amusant de les voir groupés, ces deux emblèmes, dans le même carré. Comme si Niort avait voulu concentrer là un résumé de son épopée avant que de s'engourdir et décliner. Ce fut une ville ouvrière aux nombreuses manufactures et dont les chamoiseries furent un fleuron. Il est question, ais-je lu, de peauseries niortaises dès le moyen-âge. Les niortais préféreraient que je parle sans doute des dragons en ferraille. J'en ai causé sur d'autres blogs, j'y reviendrai sans doute, mais pour rire. Parce que je n'ai jamais trop pigé pourquoi on honnore les dragons plutôt que le chevalier Guillaume (repris de justice selon certains) qui terrassa la bête alors même qu'elle était la cause, dit la légende, de la ruine de la ville. Pendant longtemps une procession célébra cette victoire. Aujourd'hui la ville s'est embourgeoisée parce que les mutuelles ont induit un esprit moutonnier et que la classe ouvrière s'est désintégrée. Mais il reste des choses à voir... Les jolies fleurs de nos jardiniers ; dont j'ai déjà parlé, et cette année ils se sont défoncés à la tâche ; et le folklore local du samedi en particulier. Il y a le marché bien sûr, évoqué sur mes anciens blogs, mais c'est de ce qui gravite autour dont je veux parler...
Pierre le gitan et ses beaux paniers... Achetez lui, ne serais-ce que pour faire un cadeau, une déco, ou les courses, ça l'aidera à vivre et puis ça vaut beaucoup mieux que ces vacheries "made in china" défoncées en moins de deux. Je lui ai promis de lui imprimer la photo dès que j'aurais trois sous au compagnon ; un cadeau en mémoire de mes relations de jeunesse avec le monde du voyage... Oui, il m'a autorisé à photographier.
Les accordéonistes pères et fils... très sympa... je n'en mets qu'un parce que ça rame trop pour les photos, mais ils sont faciles à repérer et je trouve formidable ce reste d'un autre temps qui anime les rues... Ne les oubliez pas si vous avez une petite pièce en rab... et pour le premier mai, ils vendent du muguet... Je leur en ai acheté les autres années (cette année je n'ai pas eu mon brin de muguet).
Les baveux gratuits édités par les journaux locaux payants (Nouvelle République et Courrier de l'Ouest), je ne sais plus lequel est l'autre... les distributrices sont charmantes, mais bon, le problème de ce truc là est que les gens les prennent pour les balancer n'importe où pour une part d'entre eux... J'en ai mis deux pleins cabas au papier en un mois, ramassés un peu partout.
Ca c'est l'autre baveux, frère du précédent et concurrent. Je ne me permettrai pas de donner mon apréciation sur le contenu. de l'un par rapporrt à l'autre. J'ai une préférence tout de même. Je ne trouve pas ça trenscendental, mais j'y ai glané des choses intéressantes. Ca se veut promo de la ville, c'est parfois un peu trop dithyrambique pour un vieux grognon comme mézigue, surtout qu'à travers ça, ça prends le contrepied des journaux qu'ils représentent et qui, quoique peu mordants, sont tout de même plus nuancés. Enfin, comme je disais : les distributrices sont charmantes, on leur prendrait le canard rien que pour les voir sourire et leur faire plaisir ;-)
Les abords du marché sont très vivants, du moins quand il ne fait pas froid et qu'il y a du soleil... Le niortais craint les intempéries comme le sucre. Décalage avec moi qui m'accomode très bien de la pluie, du froid, de n'importe quel temps. Mon côté racines paysannes sans doute. L'urbain est tellement conditionné à vivre à l'abri qu'il frissonne au moindre courant d'air. Résultat, les jours de pluie, les producteurs du marché n'écoulent pas bien leurs légumes et ont du mal à tenir la route après. Il faut du courage pour venir vendre ici depuis plusieurs dizaines de bornes souvent : les places sont chères et rares.
Une forte présence politique dès que se profilent au loin la moindre perspective de campagne électorale, avec une majorité de partis de gauche. Les "officiels" devant, les plus petits en satellites autour... Certains militants sont sympas, d'autres beaucoup moins ; ceci indépendamment de leur drapeau et tendance. Celui-là m'amusait avec son titre... Dans "militant" y'a "militaire" et "discipline" (de parti). Moi qui appelle tant à la discipline citoyenne sur "Canal-Décharge", je suis revenu de celle de parti depuis longtemps. Marcher au pas pour servir les ambitions d'une vedette n'est pas ma conception de la chose publique. Aujourd'hui je tend à croire que l'on marche dedans de n'importe quel pied ça empeste... Et le problème là, je le porte pas au niveau local, mais bien au niveau national et international. Mais ici comme ailleurs, y'a encore des gens pour y croire ; pour s'imaginer qu'on peut faire du vin nouveau avec de vieilles outres. Incommensurable naïveté de l'homme... Enfin, ça a le mérite de mettre un peu d'animation.
La nuit, la ville s'engourdit... Errent quelques noctambules dans des états approximatifs, quelques vandales aussi... Parfois des amoureux mais c'est rare... Il s'engouffrent dans leurs carosses dès qu'ils peuvent... et alors les dragons reprennent leurs droits et montent à l'assaut pour dévorer les imprudents qui sortiraient sans épée et armure bénites... La nuit sourd des profondeurs souterraines les échos des déchirures passées... et pourtant, vers le petit matin, là je commence à me sentir chez moi, avant que la ruée des chevaux d'acier ne me rejette dans mon monde occulte.