Le scarabée disait...

L'image là, je l'ai récupérée sur un catalogue qui proposait des fesques pour décorer sa maison ; je ne savais même pas que ça existait. C'était sur une décharge sauvage que j'avais nettoyée, une des premières, je venais de rentrer dans ma région depuis quelques semaines seulement ; A ce moment là je croyais que c'étaient des "accidents" naïf que j'étais. Faut dire que j'avais été absent près de trente piges hein ? Et que j'avais rarement eu l'occasion de m'y attarder depuis à part un petit coucou de temps en temps à ma tribu. Depuis les lecteurs de Canal-Décharge savent combien je me berlurais ! Je suis revenu pour ma tribu justement, et j'aurais mieux fait de me casser les deux guiboles. Contrairement à mes espérances, ça n'a pas profité à mon gamin, il eût été mieux ailleurs, partout ailleurs ; mon père que je tenais à soutenir moralement dans ses derniers instants, est parti pour les champs célestes et ma mère se faire voir ailleurs dans un endroit où elle est sensiblement plus en sécurité et mieux considérée aussi. Parce qu'alors, qu'est-ce que certains ont pu lui faire comme mal ! Y'aurait une série noire à écrire dessus. "Les misérables" à coté c'est de la daube, j'exagère pas ! Et c'est pas avec ses 400 balles de retraite, elle qui a bossé toutes sa vie depuis l'âge le plus tendre, qu'elle va venir me voir, quant à moi, j'suis dans la merde. On s'étonne après que je sois peu liant, moi qui avait tant de potes là où j'étais avant ! J'suis pas le Christ mézigue, et je pardonne pas si facilement. Ne me parlez pas du prêchi-prêcha sur "l'amour" dont on m'a rebattu les oreilles à longueur de vie pour accéder au paradis. C'est l'argumentaire fastoche pour amener à accepter l'inacceptable. D'ailleurs "amour" ; Ce mot est un grand sac qui enfle comme une baudruche et qu'on carre à toutes les sauces... Les anciens grecs avaient une multitude de mots introduisant toutes sortes de nuances, nous n'en avons qu'un ce qui traduit une réalité psychologique : l'impossibilité où nous sommes de projeter dans le réel des nuances et conduit à un appauvrissement de la pensée dont vous n'êtes même pas conscients.
Le rapport avec le scarabée ? C'est une vieille chanson qui m'est remontée à la mémoire ce matin en me levant. Parce que maintenant, alors que je suis venu ici en ayant mieux fait de me casser les guibolles, ben j'les ai en compote justement. Et je ne puis guère m'écarter de la maison. La chanson c'était "Dans un amphithéatre-phithéatre, un scarabée disait, ah c'qu'on s'emmerde ici ! Ah c'qu'on s'emmerde ici !" j'ai oublié la suite... Ca remonte à mes dix-quinze premières années... A dire vrai, ma vie n'a jamais été mariole à cent pour cent... J'ai juste connu quelques bons moments qu'heureusement que je les ai connus sinon ce serait à se demander pourquoi avoir vécu ? 

j'suis né dans la crèche : sur un tas d'emmerdes entre la vacherie et la connerie pour réchauffer ma couche, trois méchants trolls m'ont fait présent de la douleur, de la tristesse et de la difficulté tandis que les gardiens de l'enfer jouaient une marche funèbre en m'agonissant de chants d'injures... Une étoile noire apparue au fond de l'abîme les avaient guidés jusque là.

Et pendant ce temps là, y'en a qui se font pas chier et qui ont tout les droits. En v'la encore un tiens qui s'emmerde pas. J'ai monté ensemble la photo d'hier et celle de cinq heures ce matin. C'est la même bagnole. Le mec, pas le courage de faire trente mètres ou cinquante ! Mézigue j'ai un garage et je paie donc même la nuit alors que j'ai pas de fric et je fais une borne minimum pour récupérer ma tire, j'y emmène les affaires avec un diable ou un chariot (pas chourravé à un supermarché : en propriété privée personnelle hein ?) mais cézigue qu'a plus de thune lui, il a tous les droits. Pas une fois je me suis stationné à cet endroit. Les parking sont gratos la nuit. De toute façon y'en a le jour aussi. J'ai l'impression amère que plus tu fais le con et mieux t'es toléré ici ; à condition d'avoir de la thune bien sûr. Oui, que je vous dise : la poubelle devrait être à la place de la bagnole, c'est son emplacement marqué par la mairie. Le jour où je verrai une de ces ventouses ; y'en a le jour aussi ; se faire embarquer, promis je fais un papier spécial sur la question. 
Enfin, c'est une merde parmi d'autres. Quand je pense que nous on a récolté une amende sur un parking où on avait payé la place y'a quelques années ! (j'ai encore mes bafouilles de protestation et les réponses)... Alors maintenant que j'ai plus les moyens de m'échapper même pour quelques heures, vous pigez bien que la chanson du scarabée hein ?

Heureusement, hier, tandis que je me battais au corps à corps avec mon PC parce qu'un courageux flibustier s'était mis dans la citrouille de le reconfigurer à sa fantaisie ; j'ai gagné par ipon (oui j'ai fait 1 chouïa de judo dans le temps) ; une petite mésange est venue me dire bonjour par la fenêtre et m'a offert un petit pas de danse. Je vous ai mis un montage de deux photos prises à ce moment là, par la fenêtre et au zoom. Ca me console misérablement de ne pouvoir aller les saluer chez elles dans la nature. Qu'est-ce que c'est dur la vie d'un oiseau quand on y réfléchit ! Toujours confronté aux intempéries, sans cesse en quête de nourriture, perpétuellement sur le qui-vive de l'éventuel prédateur.« il y a plus de larmes versée sur la terre qu'il n'y a d'eau dans l'océan. ... » (Jean Giraudoux) ; ca rejoint finalement le Bouddha qui affirmait que toute vie est souffrance. Mais je crois que la souffrance, elle est permanente pour ces innocentes créatures dont nous avons grignoté l'espace vital et qui s'adaptent tant bien que mal au peu qu'on leur laisse. Au fond il y a une parenté entre mon adversité, qui est celle de tous les misérables de cette vallée de larmes, et la leur.  Les moralistes, toujours empressés à me chapitrer, me rétorqueront que les enfants du Mali..; Parce que vous vous imaginez que j'y pense pas peut-être ? Mais justement : que puis-je pour eux dans la situation où je me trouve ? Je voudrais pouvoir, ne serais-ce qu'une goutte dans l'océan... Ceux qui pourraient, eux, que font-ils ? Ils se tirent planquer leur magot à l'étranger. Et ceux qui ne le font pas, c'est juste parce qu'ils n'ont pas encore eu l'occasion. Je pense à l'instant à un artiste que j'ai soutenu dans une lutte et qui au final m'a fait une sorte de bras d'honneur... Mais on en reparlera... Cherchez pas, personne en dehors de ma moitié n'est encore au courant vraiment. J'ai fermé ma gueule... Parce que je suis comme les éléphants. Ou la mule du pape comme vous voudrez.

La massacraise

 Allons enfants de la galère

le jour de glaire est avéré

Contre nous de la bannière

le standard humiliant est levé

Entendez vous dans nos bagnes

Vomir ces ignobles honnissants

qui viennent jusque dans nos grabats

harceler nos fils nos compagnes !

Aux barricades galériens !

Hurlons, gueulons !

Qu'un flot impur

lave le goudron !